Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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1. On a présenté un modèle d’inspiration pragmatiste de la connaissance comme processus d’enquête de questions et réponses (récemment développé par Ch. Hookway) et dont le schéma est le suivant : 1. X sait Q ; 2. la réponse de X à Q est P ; 3. donc, P.

2. On a d’abord souligné les mérites de l’approche : tout d’abord, une conception dynamique et non statique de la connaissance ; ensuite, une conception intéressante des vertus comme des croyances-dispositions-habitudes sur un modèle peircien plus qu’aristotélicien (celles-ci sont par définition, indéterminées, non rigides). On voit mieux aussi les liens entre connaissance et agentivité mentale et épistémique, avec l’action (sur le mode de la délibération pratique et théorique). Cela permet aussi d’insérer la connaissance dans une sémantique de l’assertion, de souligner, en outre, le rôle des états affectifs et du « sentiment », comme faisant partie de et non comme étant contraires à la rationalité. Le modèle permet enfin de prendre en compte le niveau métacognitif, et dès lors, de renforcer les liens avec l’éthique, la philosophie de l’esprit, la psychologie cognitive, et la métacognition.

3. Mais l’approche présente au moins trois limites. Même si la connaissance est enquête, le « tout » de la connaissance ne s’y réduit pas. Il faut aussi insister sur l’importance de la justification. L’enquête est une investigation responsable impliquant des traits de vertu et des états affectifs, mais aussi des exigences à respecter par des enquêteurs responsables. Quant au doute, il relève plus de chocs avec l’expérience que d’états affectifs, ce sont ces chocs qui obligent à réviser les croyances. La méthode est d’enquête « scientifique » (et non d’autorité ou de ténacité), censée fixer des croyances vraies, justifiées par des choses réelles stables et externes ; l’enquête est soumise à des règles et non à des maximes conversationnelles, elle suit une méthode inférentielle (déduction, induction et abduction), selon des procédures prescrites par « l’économie de la recherche ». Partant, l’enquête exige plus que délibération et communication (contrairement à une éthique de type habermasien). L’enquête est également liée aux contraintes qui pèsent sur l’assertion : celle-ci implique l’idée d’un engagement soumis à des sanctions. Ce qui est visé, en effet, c’est la connaissance et la vérité. La « norme de vérité » agit quasiment, de façon transparente, comme norme cognitive ultime.

Enfin on a surtout insisté sur la réponse insuffisante que constitue, selon nous, ce modèle au défi du scepticisme. Nous avons assez longuement illustré, à cet égard, les différences de conception respectives de Peirce et de Wittgenstein et conclu, ici encore, à la nécessité d’un autre modèle pour répondre à ces difficultés.