Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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Les variations de la teneur en CH4 mesurées dans la carotte de glace EPICA Dôme-C en Antarctique permettent de remonter jusqu’à 800 000 ans BP. Les fluctuations à long terme peuvent s’expliquer par la superposition des composantes cycliques correspondant aux paramètres de l’orbite terrestre (précession, obliquité et excentricité). Le forçage astronomique a fait varier l’insolation saisonnière aux différentes latitudes ce qui a conduit à des migrations de la zone de convergence intertropicale et des changements dans les systèmes de mousson. Ces variations climatiques ont influencé les sources et les puits de méthane de la zone intertropicale.

En soustrayant la composante cyclique de l’enregistrement brut de pCH4, on peut extraire une composante de haute fréquence. Celle-ci est manifestement en corrélation avec les variations rapides de température observées dans l’hémisphère nord (événements de Dansgaard-Oeschger (DO) identifiés dans les glaces du Groenland). Cette variabilité rapide du CH4 est aussi corrélée aux changements de la mousson asiatique enregistrée dans les stalagmites chinois. L’événement DO le plus récent (DO1 ou Bölling-Alleröd) permet d’étudier avec grande précision le déphasage entre le CH4 atmosphérique et la température du Groenland. Les résultats montrent que les deux paramètres ont évolué de façon quasiment synchrone avec un décalage inférieur à 25 ans.

En considérant le gradient interhémisphérique de pCH4 sur la même période (différence entre les enregistrements du Groenland et de l’Antarctique), il est possible de proposer des scénarios d’émissions du CH4 faisant intervenir à la fois des sources boréales liées au réchauffement, ainsi que des sources tropicales liées à la réactivation des zones humides. Pour aller plus loin dans la discrimination des sources, le rapport 13C/12C a été mesuré en parallèle à la pCH4 pour la dernière période glaciaire. De façon surprenante, les variations du 13C/12C du CH4 ne sont pas corrélées avec celles de la pCH4, mais elles suivent les fluctuations de la pCO2 atmosphérique. Il y aurait donc aussi un contrôle par le CO2 sur les écosystèmes tropicaux produisant le CH4, notamment sur les rapports entre plantes en C3 et C4, les premières étant favorisées par les hausses de la pCO2.