Ce cours est d’abord constitué d’une longue introduction discutant des grands enjeux de la question du stockage des énergies. Pour développer les énergies renouvelables, en particulier l’énergie solaire, intermittentes et diluées, et les incorporer dans les réseaux électriques, il faut développer les technologies de stockage d’énergie. Les besoins sont énormes. Même si le stockage électrochimique (batteries) est un élément important de la stratégie générale, ce cours ne discute que de stockage chimique : décomposition de l’eau en oxygène et hydrogène, utilisation de la biomasse (biocarburants), valorisation du CO2. Ce dernier point est plus particulièrement développé car il s’appuie sur une démarche originale de chimie bioinspirée, la photosynthèse artificielle. Les chimistes de synthèse s’attaquent aujourd’hui à cette question à travers la construction et la mise au point de cellules photoélectrochimiques ou de cellules d’électrolyse couplées à des panneaux voltaïques, convertisseurs d’énergie solaire en énergie chimique. Les quelques exemples de tels dispositifs, certes encore insuffisamment performants, récemment rapportés dans la littérature, sont présentés et discutés. Les composants chimiques clés de ces dispositifs sont d’une part les collecteurs de l’énergie lumineuse (photosensibilisateurs, semiconducteurs) et d’autre part les catalyseurs pour l’oxydation de l’eau (anode) et pour la réduction du CO2 en molécules riches en énergie (cathode).
La seconde partie de ce cours essaye de montrer, plus spécifiquement, comment ces technologies peuvent être couplées à l’utilisation de microorganismes qui sont alors utilisées comme « biocatalyseurs » ou « usines cellulaires ». En effet, ces derniers offrent l’avantage de pouvoir être modifiés génétiquement (ingénierie métabolique, biologie synthétique) pour détourner leur métabolisme carboné vers des molécules d’intérêt. On peut soit déposer alors ces microorganismes modifiés directement sur des électrodes (formation de biofilms) d’où ils tirent les électrons nécessaires à leur métabolisme (on parle par exemple d’électrocarburants), soit les introduire dans des dispositifs qui produisent des carburants, comme l’hydrogène ou l’acide formique, qu’ils peuvent utiliser comme source d’énergie. Les bactéries les plus étudiées sont des chimioautotrophes qui sont capables de réduction du CO2 (acétogènes, méthanogènes, organismes aérobies, etc.). Quelques exemples récents de telles réalisations sont discutés : (i) synthèse de butanols ou d’isopropanol par des souches modifiées de Ralstonia alimentées par de l’acide formique ou de l’hydrogène formé électrochimiquement(Science, 2012 ; PNAS, 2015) ; (ii) production d’acide acétique utilisant des biofilms d’acétogènes sur électrodes de carbone (mBio, 2010) ; premier système de photoélectrosynthèse microbienne qui utilise une cellule photoélectrochimique fournissant des électrons à un biofilm d’acétogènes pour produire de l’acide acétique, utilisé dans un second temps par une souche génétiquement modifiée d’E. coli construite pour produire des molécules à haute valeur ajoutée (carburants, polymères, médicaments, etc.) (Nanoletters, 2015).