Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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Résumé

C’est peut-être accorder une confiance excessive dans l’impérieuse succession des régimes d’historicité que de croire qu’on en a terminé aujourd’hui avec la conception d’une histoire magistra vitae, maîtresse et oracle de nos vies. Le détour par les théories narratives de l’exemplification, de Karlheinz Stierle à Timothy Hampton, permet de ressaisir à nouveau frais la question de la puissance de l’exemplaire dans l’historiographie humaniste du Quattrocento. Lecteurs de Salluste, les tyrannicides de l’Italie du XVe siècle entendent renverser le monde par la seule force des exemples antiques, dans lesquels ils voient la préfiguration des conjurations à venir. On tente de le saisir à partir d’une analyse machiavélienne de la séquence meurtrière qui mène de l’assassinat du duc de Milan Galeazzo Maria Sforza en 1476 à la conjuration des Pazzi, deux ans plus tard, à Florence. Ainsi peut-on mieux comprendre à quoi attente l’attentat. En nous séparant de notre capacité de récit, il nous livre sans défense à une machine narrative dont personne ne maîtrise les emballements.

Sommaire

  • Magistra vitae, l’histoire maîtresse et oracle de nos vies : révolution narrative et ancien régime d’historicité
  • Le débord de l’histoire, des vies inexemplaires qui ne s’offrent pas à l’imitation
  • L’exemple n’est probant que s’il « montre les conséquences inévitables de telle ou telle décision prise dans une situation donnée » (Karlheinz  Stierle)
  • La longue crise moderne de l’exemplarité
  • Comment la littérature humaniste a écrit par avance l’histoire de son temps (Timothy Hampton, Writing from History. The Rhetoric from exemplarity in Renaissance littérature, 1990)
  • Vestigia immitando : en 1476, Girolamo Olgiati, tyrannicide et lecteur emporté
  • « Tout le monde a lu la Conjuration de Catilina écrit par Salluste » (Machiavel)
  • La politisation de la réception de Salluste au XVsiècle
  • An act of reading (Timothy Hampton) : le roman d’un lecteur
  • Une intrigue humaniste : lire un livre et renverser le monde (Stephen Greenblatt, Quattrocento, 2013)
  • Au plus près du prince : Bernardino Corio, historien, humaniste et majordome
  • Mauvais augures, pronostications et médecine princière (Monica Azzolini, The Duke and the Stars. Astrology and Politics in Renaissance Milan, 2013)
  • La conjuration de Giovanni Andrea Lampugnani, Carlo Visconti et Girolamo Olgiati : souvenir familial, mémoire civique, régénération politique
  • Chercher le mauvais sujet : Cola Montano;
  • Lucia Marliani, Bona di Savoia et la novellistica
  • Mutazione di stato : la curialisation de la société politique milanaise au temps de Galeazzo Maria Sforza (Gregory Lubkin)
  • Les fêtes de Noël à Milan : logiques spatio-temporelles du tyrannicide
  • Du « meurtre du seigneur » (Robert Jacob) au Village des « cannibales » (Alain Corbin) : le long Moyen Âge du régicide sacrificiel
  • Santo Stefano, 26 décembre 1476 : io sono morto
  • Le Conseil secret et le secret de l’État
  • De l’assassinat de Galeazzo Maria Sforza à la conjuration des Pazzi (1476-1478)
  • Correspondance diplomatique, imprimerie et guerre de l’information : la conservazione di stato (Riccardo Fubini)
  • À Milan puis à Florence, deux stratégies divergentes pour forger à chaud une interprétation rassurante de l’événement
  • « Un prince qui veut se garder des conspirations doit donc craindre davantage ceux auxquels il a fait trop de bien que ceux à qui il aurait fait trop d’injures » (Machiavel, Discours sur la première décade de Tite-Live)
  • À quoi attente l’attentat ? En nous séparant de notre capacité de récit, il nous livre sans défense à une machine narrative dont personne ne maîtrise les emballements (Uri Eizensweig, Fictions de l’anarchisme, 2001)