Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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L’épopée de Gilgamesh est en quelque sorte la meilleure entrée en matière pour la question de la condition humaine. Gilgamesh dont on peut traduire le nom par « l’ancêtre (est) un (jeune) héros », a probablement d’abord été un roi historique qui régna sur Uruk aux alentours du XXVIIe siècle avant notre ère. Il est mentionné dans plusieurs documents dès la fin du 3e millénaire et les anciens Mésopotamiens le considéraient comme l’homme le plus important de tous les temps. Le personnage de Gilgamesh a très vite été divinisé ou héroïsé. On retrouve son nom sur une liste de divinités datant des environs de 2400 avant notre ère. La Liste sumérienne des rois, lui attribue des origines surnaturelles. Quant à l’Épopée, elle le dit fils de Lugalbanda – prédécesseur déifié de Gilgamesh dans la Liste sumérienne des rois – et de la déesse Ninsun, la Dame Bufflonne. Ainsi, « en lui deux tiers sont divins, un tiers est humain ».

L’histoire de la formation de l’épopée est très intéressante pour le bibliste, car elle se déroule en plusieurs étapes.

  1. À l’origine, il n’y avait pas une seule épopée mais différentes histoires indépendantes les unes des autres (écrites en sumérien vers 2000-1700) relatant les exploits et les prodiges de Gilgamesh (Bilgames en sumérien) : (a) l’exploit contre Ḫuwawa, (b) contre le Taureau céleste, (c) la descente du serviteur de Gilgamesh, Enkidu, aux enfers, (d) la mort de Gilgamesh, (e) la victoire de Gilgamesh contre Agga de Kish. Les écrits les plus anciens sur Gilgamesh sont de courtes histoires, tenant généralement sur une seule tablette d’argile. Ces différentes légendes ne sont pas liées entre elles et il ne fait aucun doute qu’elles ne constituaient pas une unité littéraire.
     
  2. Des tablettes en vieux-babylonien à partir du XVIIIe s. av. notre ère, bien que très fragmentaires, laissent penser qu’il y avait déjà une épopée qui portait le titre « Šûtur eli šarri », « Le plus grand parmi les rois » ; les différents fragments montrent qu’il n’y avait pas de version canonique mais que différentes versions coexistaient.
     
  3. Entre les XVIe et XIe siècles, l’épopée de Gilgamesh connaît une large diffusion. Des fragments ont été trouvés à Emar, Megiddo et Ugarit. À Bogazköy on a découvert des fragments d’une version en hittite qui condense les aventures de Gilgamesh en trois tablettes (appelées « chant de Gilgamesh ») et à Nuzi des fouilles ont fourni des fragments en hurrite relatant le combat contre Ḫuwawa.
     
  4. Durant le premier millénaire se développe ce qu’on appelle souvent une « version standard de l’épopée », dite aussi version ninivite, car la majeure partie des témoins connus, datant des environs de 650 avant J.-C., a été retrouvée à Ninive dans la bibliothèque du roi assyrien Assurbanipal. Celle-ci remonte à l’activité d’un scribe du nom de Sîn-lēqi-unninni qui dans la mémoire babylonienne est considéré comme l’auteur de l’épopée de Gilgamesh. Il a peut-être vécu à la fin du deuxième millénaire et a repris un texte plus ancien (d’autres le considèrent comme un poète légendaire, tel Homère). C’est apparemment lui qui a organisé et transformé l’ancien poème du début du deuxième millénaire en 12 tablettes.

Références

[1] Marhîtum, terme rare, signifiant une femme fécondée (George, 284 ; Ziegler, 304, n. 60).

[2] Le même mot apparaît en Jg 9,14 et en Ps 58,10  où il est souvent traduit par « buisson d’épines ». Dans l’imaginaire contemporain et, peut-être grâce à Gilgamesh, le lycium est encore associé à la longévité, comme le montre une publicité consultable à http://aloemalick.skyrock.com/409769438-Lycium-Plus.html (consultée le 10.11.2011).