Actualité

Des nanofougères de zinc capables de recycler le CO2

Une équipe de scientifiques dont le professeur Marc Fontecave et ses collaborateurs Sarah Lamaison et David Wakerley, du laboratoire de chimie des processus biologiques (Collège de France/CNRS)[1], viennent de mettre au point des catalyseurs permettant de réduire le CO2 à une vitesse record pour des systèmes principalement à base de métaux non nobles. Cette avancée fait l’objet d’une publication dans la revue américaine Joule.

Face à l’accumulation du CO2 dans l’atmosphère et à ses effets adverses, les scientifiques tentent de mettre au point des systèmes électrocatalytiques pour la réduction du CO2 en produits carbonés d’intérêt. Cette stratégie vise du même coup à modérer l’accumulation du CO2 et à créer de nouveaux canaux de production de synthons chimiques, aujourd’hui d’origine fossile. Une analyse technico-économique publiée récemment dans la revue Science[2] montre cependant que le CO2 doit être converti avec un rendement suffisant tout en minimisant la taille des dispositifs (densité de courant de réduction du CO2 d’au moins 300 mA.cm-2), pour garantir la viabilité économique d’une telle stratégie. Pour atteindre cette cible, un gros effort de recherche au sein de la communauté scientifique est consacré au développement des catalyseurs nanostructurés présentant donc une surface de réaction maximale sur une électrode de taille restreinte.

C’est dans cette veine que s’inscrivent les travaux de l’équipe de Marc Fontecave, professeur au Collège de France, visant à développer des catalyseurs peu onéreux, actifs en réduction du CO2 et sélectifs pour un produit donné. Parmi les candidats envisagés, le CO est particulièrement intéressant pour différentes industries (métallurgie, chimie...) Classiquement catalysée par l’or et l’argent, la conversion du CO2 en CO peut aussi être conduite sur le zinc bien moins coûteux, mais jusqu’ici écarté car difficile à nanostructurer.

Les récents travaux du Collège de France associé au CNRS permettent de lever ce verrou en proposant une stratégie d’alliage pour générer des catalyseurs à base de zinc (>90 %) à très haute surface spécifique (>2000 cm2.cm-2 d’électrode). Cette stratégie repose sur la découverte de l’effet promoteur de l’argent sur la croissance du zinc : en très faibles quantités (2, ces structures permettent de transformer efficacement le CO2 en CO (efficacité faradique de formation du CO allant jusqu’à 94 %) à des densités de courants pertinentes en vue d’une application industrielle (entre 200 et 400 mA.cm-2).

Ces performances rivalisent avec celles de catalyseurs composés purement de métaux nobles mais sont obtenues ici avec des catalyseurs peu onéreux et facilement synthétisables. Autant de critères qui constituent un pas supplémentaire vers l’application à échelle industrielle de tels dispositifs de recyclage du CO2.

Notes

[1] Autres laboratoires impliqués : Laboratoire de réactivité de surface (LRS, CNRS/Sorbonne Université), Institut des matériaux de Paris Centre (IMPC, CNRS/Sorbonne Université/ESPCI Paris), Chimie du solide et de l'énergie (CSE, Sorbonne Université/Collège de France/CNRS), Institut de recherche de chimie Paris (IRCP, CNRS/Chimie ParisTech) et Institut de minéralogie, de physique des matériaux et de cosmochimie (IMPMC, CNRS/MNHN/Sorbonne Université).

[2] De Luna, P., Hahn, C., Higgins, D., Jaffer, S. A., Jaramillo, T. F., and Sargent, E. H. (2019). What would it take for renewably powered electrosynthesis to displace petrochemical processes? Science 350, eaav3506.