Amphithéâtre Guillaume Budé, Site Marcelin Berthelot
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La notion de souveraineté, surtout en Europe après les traités de Westphalie (1648), semble un peu fétichisée dans l’historiographie de nos jours, et surtout dans les sciences politiques, même qu’il y a peu de pays vraiment « souverains » dans le monde contemporain.

Au XIXe siècle, le reproche que le Khanat tatar de Crimée n’était pas un État souverain servit à plusieurs historiens et orientalistes russes et même occidentaux pour justifier l’annexion du Khanat par l’Empire russe. En regardant les Tatars comme les marionnettes turques, et leur État comme un parasite, incapable de survivre et fonctionner sans une protection étrangère, l’historiographie impériale russe présentait la conquête de Crimée par les tsars comme un acte bénéfique pour ses habitants et pour l’entière civilisation humaine. Cette conception fut héritée par l’historiographie soviétique, sauf pendant la brève période des « renaissances nationales », dans les années 1920.

Par une réaction assez naturelle, les historiens tatares soulignent la souveraineté du Khanat et tendent à minimaliser l’influence ottomane sur ses institutions et fonctionnement.

Une lecture de la correspondance entre les sultans ottomans, les rois de Pologne, et les khans de Crimée, provenant des XVIe et XVIIe siècles, montre que la question de souveraineté du Khanat était fortement disputée déjà par les contemporains, aussi bien que par les historiens de nos jours.