Salle 2, Site Marcelin Berthelot
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Au cours de cette troisième leçon, nous avons analysé l’histoire des fullerènes, puis décrit et discuté leurs propriétés chimiques, les structures obtenues à l’état moléculaire ou à l’état solide et leurs propriétés physiques. Certaines superbes ultrastructures à base de fullerènes obtenues par des procédés contrôlés de précipitation-agrégation ont également été présentées.

Les fullerènes sont des oligomères carbonés dans lesquels les carbones sont hybridés sp2 comme ceux formant les plans graphitiques et qui forment un polyèdre convexe de forme globalement sphérique ou ovoïdale. Des études spectroscopiques ont montré que les nuages de gaz des étoiles géantes rouges contiennent des molécules carbonées, des oligomères, analogues à des chaînes de formule Cn. Afin d’identifier ces molécules Cn, il fallait trouver des conditions en laboratoire simulant la formation de ces oligomères. En 1985, Harold W Kroto, Robert F. Curl et Richard Smalley font, au cours de simulations en laboratoire dans les conditions physiques nécessaires à la formation des étoiles géantes rouges, une découverte étonnante : la vaporisation d’une cible en graphite par un laser dans une enceinte remplie d’hélium conduit à la formation d’oligomères carbonés mis en évidence par spectrométrie de masse. La présence de molécules carbonées de masse moléculaire 720 est observée mais en quantité trop faible pour permettre une caractérisation complète et correcte. Sur la base de cette donnée et de la masse atomique du carbone (12), la formule C60 est proposée (12 × 60 = 720). En utilisant cette simple donnée et en s’inspirant de la structure de la biosphère (ancien pavillon américain) construite par l’architecte Buckminster Fuller pour l’exposition de Montréal en 1967, Harry Kroto propose une structure sphérique pour la molécule de C60 baptisée fullerène C60. La structure proposée correspond à un polyèdre (Icosaèdre tronqué). Chaque fullerène forme une classe unique de molécules sphériques contenant un système d’électrons π conjugué. Il est composé d’un réseau fermé d’hexagones et de pentagones fusionnés. Ce principe de construction est une conséquence du théorème d’Euler qui indique que, pour la fermeture de chaque réseau sphérique par n hexagones, douze pentagones sont nécessaires, à l’exception de n = 1. La présence des pentagones permet l’introduction de la courbure et nécessite que les atomes de carbone soient pyramidés, ce qui va entraîner, pour ces composées sphéroïdaux, des réactivités différentes par rapport à celle des molécules aromatiques conventionnelles. Plus simplement, la structure du C60 est semblable à celle d’un ballon de football composé de vingt panneaux hexagonaux et de douze panneaux pentagonaux. Les travaux et procédés développés par Wolfgang Krätschmer et Donald Huffman ont permis de caractériser plus finement et donc d’établir sans ambiguïté la structure de ces nouveaux allotropes du carbone. En effet, la production de grandes quantités de suies contenant des fullerènes par un procédé sous hélium utilisant la création d’un arc électrique entre deux électrodes en graphite permet la production de quantités suffisantes de fullerènes et donc leur purification et caractérisation par spectrométrie de masse, résonance magnétique nucléaire et diffraction des rayons X. La structure du C60 est non seulement confirmée, mais peu à peu la famille des fullerènes s’agrandit d’une poignée de nouveaux composés polyédriques (C60, C70, C76, C78, C86, C90, C100… C540). La découverte des fullerènes a ouvert une nouvelle ère en chimie car elle a bouleversé l’hypothèse traditionnelle selon laquelle la chimie organique polyaromatique doit se faire essentiellement sur des molécules planes. La fonctionnalisation de ces nouvelles molécules est une étape absolument nécessaire afin de les intégrer dans des dispositifs sous la forme de matériaux fonctionnels. Cette demande a permis de générer une chimie organique très riche que nous avons décrite à travers de nombreux exemples.