Salle 2, Site Marcelin Berthelot
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Conférence en anglais.

La communication est d'une importance fondamentale non seulement pour la survie d'un groupe social, mais aussi pour la socialité quotidienne chez les animaux sociaux, en particulier les humains. Certains soutiennent que la communication, en particulier à travers le langage humain, définit l'humanité et la place au-dessus des animaux non humains. Malgré la reconnaissance de sa difficulté et de ses complexités, une hypothèse importante a été que la communication humaine est possible, si seulement nous nous y essayons suffisamment.

Je propose que les symboles discursifs et non discursifs offrent des capacités de communication, mais ne garantit pas nécessairement la communication. Nous avons accordé moins d'attention à la façon dont nous ignorons que nous ne communiquons pas toujours. Baudelaire nous a alerté de cette inconscience déjà dans son texte Mon cœur mis à nu dans lequel il a souligné non seulement l'absence omniprésente de communication, mais plus important encore, la méconnaissance de ce manque de la part des acteurs sociaux.

Le monde ne marche que par le malentendu.
C'est par le malentendu universel que tout le monde s'accorde.
Car si, par malheur, on se comprenait, on ne pourrait jamais s'accorder.
Baudelaire [1869] 1949: 98

Baudelaire n'a cependant pas expliqué comment le malentendu se met en place.

Ma tâche consiste à développer son intuition, en déplaçant tout d'abord, le malentendu dans les espaces politiques. Il peut amener la paix entre les gens, comme Baudelaire le souligne, si cela a lieu dans des circonstances ordinaires. Mais, quand elle a lieu dans des espaces politiques, il permet aux dirigeants politiques d'égarer leur population qui coopèrent alors inconsciemment à leur propre assujettissement et/ou les mène vers leur propre anéantissement.

Plutôt que de m'intéresser aux « symboles politiques » évidents, comme les drapeaux nationaux, les monuments et l'apparat, qui pour la plupart sont en fait l'affirmation et l'affichage de la grandeur des dirigeants politiques, je me concentre sur les objets de la vie quotidienne, comme les fleurs, qui ont été amenées dans les espaces politiques. Elles ont l'air trop ordinaire pour être en mesure d'exploiter la puissance politique. Mona Ozouf a montré combien la symbolique révolutionnaire française, en particulier le symbole officiel de « l'Arbre de la Liberté », dérivait de l'arbre de Mai des traditions populaires de nombreuses régions françaises. Les emprunts républicains de fêtes populaires ont rendu le symbolisme révolutionnaire « moins étranger (…) à la sensibilité populaire. »

Nous avons ici choisi d'examiner les fleurs de cerisiers dans la culture japonaise ainsi que la rose européenne. Elles partagent deux caractéristiques importantes - les fleurs ont été plongées dans la vie quotidienne populaire ainsi que dans l'élite, et ont ensuite été transformées pour devenir des symboles politiques importants.

Le symbolisme des fleurs de cerisier japonais est riche et complexe, avec un vaste ensemble de significations apparemment contradictoires : celui d'hommes et de guerriers considérés comme des « hommes parmi les hommes », de jeunes femmes représentant la vie et leur capacité de reproduction vitale pour la poursuite de la société et des geishas, les femmes non reproductrices situées en dehors de la société normative. La fleur représente également une déstabilisation de la personnalité sociale - c'est la folie, la perte de l'identité sociale, qui se produit en pleine floraison, et l'emprunt d'une autre identité sociale lorsque l'on porte un masque pendant le rituel de contemplation des fleurs de cerisier. Elle représente le processus de la vie, de la mort, de la renaissance et de chaque étape du cycle de la vie. Elle symbolise surtout l'amour : l'intensité des relations humaines et le socle de la socialité humaine. En outre, les cerisiers ont représenté l'identité collective des japonais dans son ensemble ainsi que de pratiquement tous les groupes sociaux au sein de la société comme les associations de quartiers, les écoles, les entreprises, etc.