Salle 2, Site Marcelin Berthelot
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Résumé

Les idées modernes sur le salut sont inévitablement médiatisées par les deux grandes visions du monde qui s’imposent dans l’antiquité tardive, avec une notion objective et absolue du salut : la Salus publica de l’Empire romain, qui représentait la sécurité et prospérité de l’État, et la salus/soteria transcendante des systèmes métaphysiques chrétiens, gnostiques, ou néoplatoniciens. Pourtant, en Grèce ancienne, le salut n’était généralement pas un concept fixe et réifié, ni dans le domaine politique ni dans le domaine religieux. La projection des catégories modernes, ou la simple recherche des précédents, est souvent erronée. Pour les Grecs, chaque situation possible de salut dérive plutôt d’un récit concret, où un danger spécifique (e.g. le naufrage, la guerre, la maladie), l’action salvatrice, les individus ou les groupes sauvés, ou encore les agents sauveurs (divins ou humains) sont bien plus centraux que le concept abstrait ou généralisant de soteria.

Les différents genres littéraires (de l’épopée à la tragédie, des péans d’occasion aux protreptiques philosophiques), exploitent les récits possibles de salut de façons diverses et s’en servent pour affronter des problématiques importantes sur l’humain et le divin : e.g. la dépendance humaine à l’égard des dieux qui sauvent, la possibilité de trouver le salut dans les hommes eux-mêmes, la relation entre le salut individuel et collectif, autant de questions qui ont été traitées avec une grande diversité de solutions possibles par les auteurs comme Homère, Sappho, Hérodote, et Platon, par des politiciens d’époque classique et hellénistique, tout autant que dans les cultes locaux et les préoccupations des individus dont témoignent les inscriptions. Le vaste éventail des possibilités concrètes n’est pas incompatible avec une terminologie et des images communes. C’est à partir de ce panorama qu’il faut évaluer les différents essais, dans les domaines de la philosophie, de la religion et de la politique, de proposer des modalités de trouver un salut général en Grèce ancienne ; des tentatives qui, pourtant, ne réussiront pas, jusqu’à la fin de l’Antiquité, à imposer un récit univoque.

Intervenants

Miguel Herrero de Jáuregui

Université Complutense de Madrid