Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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Résumé

Plusieurs conceptions de l’histoire sont fondées sur une perte originelle, un défaut constitutif des choses. Ce n’est pas un hasard si saint Augustin, qui profite du sac de Rome pour prêcher la conversion, est aussi le plus ardent promoteur de l’idée du péché originel, à savoir d’une perte initiale qui aurait marqué définitivement la nature humaine : perte symbolisée par la sortie du Paradis terrestre. La première œuvre humaine mentionnée par la Bible fut le pagne en feuilles de figuier que confectionnèrent Adam et Ève après la Chute. Dans une partie de la tradition chrétienne, en effet, l’œuvre est liée à la faute et à la destinée humaine.

L’Antiquité classique, notamment dans le « mythe des races » d’Hésiode, montre aussi que le cosmos peut être conçu comme soumis à une décadence naturelle (les dieux s’épuisent à la tâche), à partir d’un âge d’or initial. Or, l’âge d’airain est à la fois celui des œuvres faites par les hommes, et l’âge de la mort (thanatos). Si en effe l’âge d’or est celui des productions naturelles, toutes interchangeables (rien ne ressemble plus à une pomme qu’une autre pomme), l’âge d’airain est en revanche celui de l’objet unique, non interchangeable, précieux, que l’on peut, que l’on doit se disputer, avec toutes les conséquences néfastes que peut engendrer la perte de cet objet, ou la peur de cette perte.