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Les deux premiers cours donnés dans le cadre de cette chaire, inaugurée en 2007, ont été consacrés à l’étude d’un cas exemplaire de mobilité textuelle entre langues, genres et situations historiques, à savoir, les appropriations théâtrales de Don Quichotte dans l’Europe des XVIIe et XVIIIe siècles. Cette recherche, commencée avec la pièce de Shakespeare et, peut-être, surtout de Fletcher, The History of Cardenio, représentée en 1613 mais dont ne subsiste ni édition imprimée ni manuscrit, et continuée avec l’analyse d’autres Don Quichotte ou Cardenio, joués sur les scènes espagnoles, françaises ou anglaises, a porté l’attention sur la tension fondamentale qui existe entre, d’une part, la malléabilité des œuvres, transformées par leurs traductions, leurs migrations d’un genre à l’autre, les significations successives que leur attribuent leurs publics, et, d’autre part, leur identité perpétuée, toujours reconnaissable dans leurs multiples adaptations. Ce paradoxe fondamental, qui associe la permanence de l’œuvre et la pluralité de ses textes, ou états, est au point de départ du cours donné cette année. Il fait retour sur le programme de recherche défini dans la leçon inaugurale d’octobre 2007, Écouter les morts avec les yeux, et fondé sur l’idée selon laquelle l’histoire de la culture écrite, saisie dans sa très longue durée, peut aider à mieux comprendre les mutations du présent, caractérisé par l’entrée de l’écrit dans le monde digital. Les débats suscités par la constitution de collections numériques, les interrogations quant aux transformations des pratiques de lecture et d’écriture, la prolifération des nouveaux écrans et la croissance du marché des livres électroniques sont autant d’indices des profondes transformations de la culture écrite dont les enjeux (juridiques, esthétiques, culturels) sont souvent masqués par le flux incessant des nouveautés ou l’âpreté des controverses. Une perspective historique, débarrassée de toute tentation prophétique, peut aider à les mieux comprendre.

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