La quatrième leçon a poursuivi l’étude du clonage en décrivant comment produire M copies approchées d’un qubit unique dans un état pur, puis de façon plus générale, M copies à partir de N qubits identiques tous dans le même état pur. Généralisant les résultats de la leçon précédente, nous avons montré que le clonage optimal de 1 vers M qubits peut être obtenu en préparant les M qubits dans un état résultant de la symétrisation par échange entre qubits du produit tensoriel de l’état du qubit à cloner avec M-1 qubits dans un état complètement dépolarisé, décrit par une matrice densité proportionnelle à l’unité. Cette opération de symétrisation est précisément réalisée, dans le cas du clonage de un qubit dans deux, par le circuit logique décrit à la leçon précédente. Dans le cas plus général du clonage de un vers M qubits avec M > 2, la symétrisation peut être réalisée par une opération unitaire sur un système associant une machine à cloner au système des M qubits, suivie d’une trace sur l’état de cette machine. Nous avons montré que la fidélité de clonage ainsi obtenue, égale à (2M + 1)/3M, tend vers 2/3 lorsque M tend vers l’infini, un résultat en accord avec la fidélité optimale de l’estimation d’un qubit. Une procédure d’estimation peut en effet consister à commencer par cloner un qbit en un nombre infini de copie avant de mesurer avec une précision arbitrairement grande, l’état de ces copies. L’opération de symétrisation étant une opération collective sur les qubits, nous avons ainsi retrouvé que les procédures d’estimation collectives sont plus efficaces que l’accumulation de mesures indépendantes sur les qubits. Nous avons ensuite généralisé la procédure au clonage de N vers M qubits en exploitant à nouveau la méthode de symétrisation. Nous avons montré que la fidélité obtenue, F = (MN + M + N)/M(N + 2) généralise au cas N > 1 le résultat (2M + 1)/3M obtenu pour N = 1 et nous avons discuté ce résultat général en relation avec la théorie de l’estimation optimale, illustrant à nouveau la cohérence interne de la théorie quantique.
Dans la seconde partie de la leçon, nous avons montré que le clonage optimal par symétrisation pouvait être naturellement réalisé non par un circuit logique complexe mais en exploitant simplement les propriétés de l’émission stimulée. Les états des qubits sont alors codés dans la polarisation horizontale (H) ou verticale (V) de photons. La machine à cloner peut être idéalement réalisée par M-N atomes à trois niveaux amplifiant les photons H et V sur deux transitions ayant un niveau excité commun. Si N photons de polarisation H « passent » sur cette machine, un nombre de photons supérieur à N est produit avec la même polarisation H sous l’effet de l’émission stimulée sur la transition correspondante, mais il s’en produit aussi avec la polarisation V sous l’effet de l’émission spontanée sur l’autre transition. Un calcul de dénombrement simple montre que la fraction produite avec la « mauvaise » polarisation permet de retrouver la limite du clonage optimal. En d’autres termes, le caractère approximatif du clonage est une conséquence de l’inévitable émission spontanée qui ajoute son bruit quantique au processus classique d’amplification. La symétrisation du clonage optimal résulte dans ce modèle simplement du caractère bosonique des photons qui sont automatiquement dans un état symétrique par échange. Si la théorie de ce clonage optimal par amplification optique est simple, sa réalisation expérimentale est délicate. Nous avons conclu la leçon par une discussion des problèmes qui se posent à l’expérimentateur. Dans le cas du clonage de N = 1 vers M = 2, il faut en effet envoyer un seul photon sur un atome excité et détecter en coïncidence les deux photons résultants. Mais l’atome émet spontanément dans tous les modes du vide, alors que le photon incident ne stimule l’émission que dans son propre mode. La probabilité de clonage est donc faible, le processus le plus fréquent étant l’émission spontanée et incontrôlable de l’atome dans un mode différent du photon à cloner. Pour résoudre ce problème d’accord de mode (« mode matching »), on remplace l’émission spontanée atomique d’un photon par un processus de conversion paramétrique dans un cristal non-linéaire émettant des photons par paires. La détection d’un photon de la paire définit le mode dans lequel l’autre est émis. En envoyant le photon à cloner dans ce mode, on peut isoler un signal sensible uniquement aux événements pour lesquels l’amplification optique est importante. Nous avons conclu la leçon par une description sommaire de l’expérience, en laissant les détails pour la leçon suivante.