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Résumé

On peut, en reprenant la distinction importante que fait Paul Boghossian dans La Peur du savoir [1], distinguer deux formes de constructivisme social. Selon la première, il n'y a pas de faits qui soient indépendants du genre de théorie (ou, comme dirait un wittgensteinien, de « jeu de langage ») que nous choisissons pour les décrire. Selon la deuxième, moins radicale et à première vue plus plausible, ce sont seulement les faits d'une certaine catégorie, ceux qui ont trait à ce qui constitue une croyance justifiée ou rationnelle, qui sont socialement dépendants et, par conséquent, relatifs : nos croyances peuvent être justifiées par des données qui ne sont pas nécessairement le résultat d'une construction, mais ce qui constitue ou ne constitue pas une donnée pertinente et probante pour l'adoption d'une croyance l'est forcément. La conséquence qui résulte de cela est un effacement de certaines des distinctions les plus fondamentales sur lesquelles semblait jusqu'à présent reposer notre culture, par exemple celles que nous sommes habitués à faire entre science et religion, science et morale, science et politique, science et philosophie, science et esthétique, etc. Il n'y a pas de raison de continuer à croire qu'un désaccord scientifique a une nature fondamentalement différente de celle d'un désaccord moral, politique ou esthétique et se résout d'une façon également différente, à savoir par l'application de normes qui peuvent être qualifiées de « rationnelles » et « objectives ». Comme le dit Rorty, « qu'est-ce qui pourrait montrer que le différend [scientifique] Bellarmin-Galilée est "d'une autre espèce" que le différend [politique] Kerenski-Lénine, ou celui [esthétique] qui opposa la Royal Academy et Bloomsbury dans les années 1920 ? [2] »

Références

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