Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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Après avoir rappelé les enjeux théoriques de l’étude de la singularité humaine, le premier cours s’est intéressé aux réseaux cérébraux du langage. Ces réseaux sont-ils réellement spécifiques à l’espèce humaine ? Une brève revue de l’anatomie fonctionnelle comparée (qui sera développée dans le cours 2017-2018 intitulé « Origines du langage et singularité de l’espèce humaine ») suggère que la région frontale inférieure, ainsi que ses connexions avec les aires temporales et pariétales inférieures par le biais du faisceau arqué, ont subi une expansion particulière dans l’espèce humaine. L’IRM fonctionnelle suggère que l’aire de Broca pourrait avoir une fonction particulière chez le primate humain, celle de rassembler les informations sous forme de représentations arborescentes ou enchâssées.

Le cours s’est particulièrement focalisé sur les données récentes du laboratoire qui indiquent comment ces aires du langage codent pour la structure des phrases. Cette recherche, réalisée par Matt Nelson, Imen El Karoui et plusieurs autres membres du laboratoire, fruit de plus de cinq ans de travail, a consisté à analyser les enregistrements intracrâniens de douze patients épileptiques alors qu’ils lisaient des phrases en anglais ou en français. Les réponses neurophysiologiques ont validé une hypothèse-clé des théories linguistiques contemporaines : l’existence d’une représentation des phrases sous forme de syntagmes enchâssés. Les signaux dans la bande de fréquence gamma augmentent au fil des mots successifs, mais décroissent soudainement à la frontière d’un syntagme. L’analyse a permis de montrer, dans la plupart des aires du langage de l’hémisphère gauche, la supériorité du modèle syntagmatique par rapport à d’autres modèles fondés uniquement sur l’apprentissage statistique des probabilités de transition entre les mots ou entre les catégories de mots. De plus, nous avons montré qu’il était possible de déterminer, parmi plusieurs analyseurs syntaxiques (parsers) proposés par les linguistes, ceux qui correspondent le mieux aux réponses du cerveau humain. Les résultats renforcent l’hypothèse de Hauser, Chomsky et Fitch selon laquelle le cœur de la faculté de langage consiste en une capacité de représentation des séquences de mots sous forme d’arbres syntaxiques enchâssés de façon récursive.