Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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Résumé

Le cours de cette année sera consacré à Paul Valéry, et, dans un premier temps, à une œuvre retrouvée : le Cours de Valéry au Collège de France (1937-1945). La chaire de Valéry était intitulée « Poétique », un mot qu’il faut entendre dans son sens étymologique (ainsi, il est parfois orthographié Poïétique), c’est-à-dire, l’étude du « faire » et des productions de l’esprit.

Ce Cours est l’objet de notre publication récente aux Éditions Gallimard, en deux volumes. Ainsi, le cours de cette année permettra de rentrer dans l’atelier et le laboratoire du chercheur en littérature.

Des auditeurs prestigieux avaient assisté au cours de Valéry, comme Maurice Blanchot, E. M. Cioran, ou encore Michel Tournier et Yves Bonnefoy, en passant par Roland Barthes – au point que ce cours est devenu une légende. Car on n’en connaissait jusqu’à présent que la brochure (la proposition de programme faite par Valéry au moment où il présenta sa candidature au Collège de France) et la leçon inaugurale. Les spécialistes connaissaient aussi la revue Yggdrasil, qui résumait les cours de la première année, ainsi que les résumés annuels publiés dans l’annuaire du Collège de France par Valéry, courts et abstraits. On savait aussi qu’à la Bibliothèque nationale de France reposait un fonds Valéry, contenant le dossier, immense et désordonné, intitulé « Poïétique » (2 500 feuillets), dans lequel seuls quelques chercheurs avaient puisé de façon très ciblée.

Ce cours était d’autant plus légendaire qu’il avait inspiré, par son nom même, la revue Poétique (outre la référence à Aristote), dont le premier numéro sortit en 1970, et qui fut la première revue française de théorie et d’analyse littéraires. L’aura du cours de Paul Valéry montre ainsi que ce dernier fut une sorte d’inventeur de la théorie littéraire moderne en France.

Ce Cours de poétique était donc une œuvre perdue, dont il ne subsistait que des reflets. C’est en effet le destin d’un cours de s’effacer après avoir été prononcé, tout en laissant des traces variables dans l’esprit des auditeurs qui y assistèrent. Notre expérience de l’édition des notes prises par T. S. Eliot lors des leçons de Bergson en 1910-1911 nous avait montré la grande variabilité des témoignages individuels laissés par les auditeurs : une même leçon suscite des notes au contenu plus divers qu’on ne croirait a priori.

Seules quelques minutes enregistrées par Radio Paris lors du cours du 15 mars 1941 permettaient d’avoir une idée de la parole évanouie de Valéry. Dans sa version initiale, notre édition devait s’appuyer sur ces éléments épars et lacunaires, c’est-à-dire essentiellement sur les « avant-dire » de Paul Valéry, qui rédigeait longuement les premiers cours de chaque année, en particulier dans les premières années. Jamais éditées, ces leçons prérédigées semblaient être ce que l’on pouvait attendre de mieux pour se faire une idée du contenu du cours, jusqu’à une découverte dont il sera question au prochain cours.