Amphithéâtre Guillaume Budé, Site Marcelin Berthelot
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3. La liturgie est ancienne

La troisième conséquence de la nouvelle représentation de l'Avesta est l'ancienneté de la double liturgie. En 1998, Kellens propose trois collations successives de textes :

  1. Un Proto-Yasna A (ensemble des textes catalogués par les premiers chapitres du Yasna) datant du début du VIe siècle avant notre ère ;
  2. Un Proto-Yasna B (liste du Visperad) datant de la fin du Ve avant notre ère ;
  3. Le Yasna que nous possédons, datant du IVe siècle avant notre ère.

Cette répartition s'est révélée être une erreur, mais l'ancienneté de la liturgie a été, quant à elle, confirmée par deux indices fournis par le Nērangestān et les Yašts.

3.1. Le Nērangestān

Un fragment particulièrement long, le Nērangestān, n'a pas été édité par Geldner. De ce fait, l'accès à ce texte n'est pas aisé. On y avait accès seulement par la traduction de Darmesteter à la fin du XIXe siècle et par une édition de Waag qui restitue un texte en inversant l'ordre des fragments ! Cette lacune a été comblée par l'édition de Kotwal et Kreyenbroek.

Anatol Waag, Nirangestan : der Awestatraktat über die rituellen Vorschriften, Iranische Forschungen 2, Leipzig, 1941.

Firoze M. Kotwal et, Philip G. Kreyenbroek : The Hērbedestān and Nērangestān, 4 vol., Paris, 1992-1995-2003-2009.

Le Nērangestān (mp. nērang « prescription rituelle ») décrit le cours du Yasna.

Alberto Cantera : « Nērangs and Nērangestān » communication faite lors de la 7th European Conference of Iranian Studies, Cracovie, 7-10 septembre 2011.

Alberto Cantera « Algunas reflexiones fundamentales sobre la transmisión del Avesta : los manuscritos mixtos de Yasna del tipo de Pt4 y los Yasna Sāde iranios Mf1 y F3a », EOS700, Salamanca, 28-30 septembre 2011.

Or, si la pratique de la composition en avestique n'a pas duré après la chute de l'Empire achéménide, alors le Nērangestān témoigne d'une liturgie remontant à l'Iran ancien.

3.2. Les Yašts

Le Yasna 57 et le Yašt 10 font la description de trois cérémonies.

Jean Kellens : « Contre l'idée platonicienne d'Avesta ou les Considérations revisitées », in : The transmission of the Avesta, éd. par Alberto Cantera, Iranica 20, Wiesbaden, 2012, pp. 49-58.

En rassemblant les indications fournies, on arrive à restituer un cursus liturgique qui ressemble à celui du Yasna : 1. déploiement du barǝsman = Barsom Yašt (Y2) ; 2. consécration des offrandes et des instruments de culte (bois, lait, pressoirs) = *Āvid (Y4) ; 3. investiture du zaotar = intercalation de Vr3-4 entre Y11.9 et 10 ; 4. pressurage du Haoma = Hōm Stōm (Y9-11.10) ; 5. choix sacrificiel en rapport avec la daēnā = Frauuāranē - Āstuiiē (Y12) ; 6. récitation de l'Avesta ancien depuis l'Ahuna Vairiia (Y27.13) jusqu'au Fšūšō mąθra (Y58). On constate donc qu'il n'y a pas de correspondance pour la fin du sacrifice, mais on la trouve dans le Hāδōxt Nask 2 (HN2). Dans le HN2.13, « Chaque fois que tu voyais un autre laisser (le haoma) sans mélange, le (...) et étendre ses branches pour en faire une jonchée végétale, tu te mettais à réciter les Chants, puis les textes-sacrificiels au sujet des bonnes eaux, du feu d'Ahura Mazdā et du partisan de l'Agencement que l'on agrée, qu'il vienne de près ou de loin. Ainsi les hommes m'offrent désormais, à moi, Ahura Mazdā, des sacrifices et des interrogatoires longs et complets » (Kellens, 1995). Dans cet extrait, on rend hommage aux Eaux (cf. Āb Zōhr, Y63-70), on sacrifie au feu (cf. Ātaš Niyāyišn, Y62) et on réjouit l'homme aṣ̌auuan (cf. Dahmā Āfriti, Y60-61). On obtient ainsi une table des matières d'un Yasna complet.