Les systèmes enzymatiques utilisés dans les applications énergétiques sont des systèmes d’une très grande complexité, élaborés au cours de l’évolution pour assurer des processus complexes de transfert d’électrons et d’activation de petites molécules. En particulier, ils possèdent des sites actifs métalliques très particuliers dont la biosynthèse et l’assemblage dépendent de l’activité d’un système cellulaire de maturation également complexe et encore incomplètement connu. Cela introduit des contraintes considérables pour la production à grande échelle de ces enzymes à des fins d’applications biotechnologiques. Dans ce cours, nous montrons comment la chimie organométallique de synthèse peut remarquablement simplifier la question de la maturation de certaines enzymes, comme l’hydrogénase à fer, très étudiée comme catalyseur pour la production d’hydrogène, notamment dans des systèmes électrochimiques.
Cette enzyme possède plusieurs centres métalliques différents : (i) des clusters fer-soufre pour les transferts d’électrons ; (ii) un centre binucléaire de fer qui assure la catalyse d’interconversion protons/hydrogène. La synthèse de ces cofacteurs est réalisée dans la cellule par des machineries multiprotéiques. Dans le cas de l’hydrogénase, on ne compte pas moins d’une dizaine de protéines impliquées dans ce processus de maturation : chaperonnes, protéines de synthèse, protéines de transfert d’électrons, protéines d’échafaudage, etc. Ce qui est décrit dans ce cours c’est la découverte récente par notre laboratoire (Nature, 2013 ; Nature Chemical Biology, 2013 ; Biochem. Biophys. Acta, 2016) d’une maturation purement chimique de l’hydrogénase. Les centres fer-soufre peuvent être assemblés simplement par traitement de l’apoprotéine avec un mélange d’un sel de fer et d’un sulfure. Dans un deuxième temps, le centre binucléaire de fer peut être introduit à partir d’un complexe organométallique de fer que nous avons conçu et synthétisé par une approche biomimétique. Cette découverte révolutionne la question de la maturation technologique des hydrogénases. Déjà de nombreuses applications de cette méthodologie sont mises en œuvre (marquage sélectif du site actif, découverte de nouvelles hydrogénases, hydrogénases artificielles, etc.) et cette stratégie est explorée pour d’autres systèmes enzymatiques (nitrogénase).