Amphithéâtre Guillaume Budé, Site Marcelin Berthelot
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Les évènements catastrophiques de la limite Crétacé-Tertiaire (environ 65 millions d’années) ont balayé les dinosaures et libéré le chemin vers l’hégémonie des mammifères sur Terre. À la suite de cet événement d’extinction de masse, un intervalle de presque dix millions d’années s’est écoulé avant que les faunes ne commencent à ressembler à celles du monde moderne. Les faunes du Paléocène ancien et moyen des continents du Nord étaient dominées par des taxons de mammifères à l’anatomie archaïque et à l’écologie étrange, qui ne sont que de lointains parents des lignées actuelles. De très petits mammifères insectivores étaient abondants et diversifiés, mais n’étaient que de lointains cousins des musaraignes, taupes ou hérissons actuels. De la même manière, les mammifères herbivores de petite et moyenne taille du Paléocène ancien et moyen nous sembleraient étranges, parce qu’ils ne ressemblaient ni aux chevaux, ni aux rhinocéros, cerfs, cochons ou ongulés actuels. Pourtant, au début de l’Éocène, il y a environ 55 millions d’années, les faunes mammaliennes de la moitié nord du globe ont subi une transformation radicale. Ces faunes éocènes comprenaient majoritairement les premiers proches parents des lignées qui peuplent les écosystèmes actuels. Quelle est la cause de cette transformation radicale, et pourquoi cela s’est-il passé si rapidement ?

À partir de la fin du Paléocène, le climat de la Terre va progressivement se réchauffer. Ce réchauffement mondial atteint un maximum à la limite Paléocène-Éocène, où la vitesse et la magnitude du réchauffement sont proches de celles observées de nos jours. Un niveau eustatique des mers plus haut qu’aujourd’hui et une position des plaques continentales légèrement différente sont la cause d’une paléogéographie différente de celle d’aujourd’hui. Les différences les plus importantes sont : (1) la présence d’une mer épicontinentale, appelée la mer d’Obik ou le détroit de Turgai, sur une bande nord-sud en Eurasie centrale, qui sépare efficacement l’Europe de l’Asie orientale ; (2) un détroit de Béring émergé en permanence, qui connecte l’Asie du Nord-Est et l’Amérique du Nord ; (3) un pont continental au nord de l’Atlantique qui relie l’Amérique du Nord, le Groenland, l’Écosse et l’Europe occidentale. L’effet très net de cette configuration est que les dispersions des premiers mammifères ne pouvaient se faire que sur des ponts de terre à des hautes latitudes. En raison de la haute latitude de ces ponts terrestres, le réchauffement climatique au cours du Paléocène récent et de l’Éocène ancien a facilité les échanges entre l’Asie et l’Amérique du Nord, et entre l’Amérique du Nord et l’Europe.

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