Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
En libre accès, dans la limite des places disponibles
-

Pour l’histoire de la peste noire, l’épidémie qui affecte l’ensemble du bassin méditerranéen, et au-delà, de 541 à 749 constitue moins un précédent qu’une comparaison obligée, placée en vis-à-vis historiographique. Si elle occupe une branche morte de l’arbre phylogénétique de Yersinia pestis, sa postérité est ailleurs : dans les enjeux méthodologiques qu’elle pose aux historiens confrontés à la discordance des sources, mais aussi dans l’imaginaire politique : entre hantises collapsologiques du contemporain et horizon eschatologique du Moyen Âge, on tente de comprendre en quoi, au-delà des conventions historiographiques, cette peste peut bien être dite « justinienne ».

Sommaire

  • « Il faut continuer… » (Samuel Becket, L’Innommable, 1953) : recommencements
  • La mémoire pathétique des gestes de la peste : quand le corps délivre une mémoire dont nous avons perdu le souvenir (Aby Warburg, Atlas Mnemosyne, 1927-1929)
  • Épaissir le temps de la peste, peupler les mondes de la peste : réassurances des savoirs lettrés et blessure narcissique
  • Yersinia pestis et l’humanité souffrante : une maladie qui n’était pas notre genre
  • Progrès scientifique et horizon de connaissances : la science pose de nouvelles questions à l’histoire
  • La génomique et la discordance des temps, une affaire de rythmes et d’échelles
  • Retour au territoire de l’historien : l’hétérogénéité des régimes documentaires
  • Entre histoire profonde et histoire globale, un regard à mi-pente
  • La peste dite « justinienne » : première épidémie historique
  • Une branche morte sur l’arbre phylogénétique de Yersinia pestis mais un opérateur puissant de périodisation (Yujun Cui, Chang Yu et al., « Historical variations in mutation rate in an epidemic pathogen, Yersinia pestis », PNAS, 2013)
  • Deux  morts en Bavière : identification des premières victimes de la peste du VIsiècle au cimetière d’Altenerding
  • Premier bilan, nouvelles interrogations : quelle échelle, quelles datations ? (Marcel Keller, Maria A Spyrou et al., « Ancient Yersinia pestis genome from across Western Europe reveal early diversification during the First Pandemic (541-750) », PNAS, 2019)
  • Ceci n’est pas un puzzle
  • Constantinople, mars 542, « Il y eut en ce temps-là une pestilence qui manqua d’emporter la race humaine tout entière » (Procope de Césarée, Histoire des guerres, 2, 22)
  • Harvard, 2015 : archéologie de la mort de masse (Michael McCormick, « Tracking mass death during the fall of Rome’s empire », Journal of Roman Archaeology, 2015)
  • Constantinople, 536 : « Combien il est étrange, je vous le demande, de voir le soleil mais sans son éclat habituel » (Cassiodore, Variae, 12, 25)
  • Belfast, 2008 : analyse dendochronologique et carottes glaciaires (Michaël Baillie, « Proposed redating of the European ice core chronology by seven years prior to the 7th century AD », Geophysical research letters, 2008)
  • Constantinople, 541 : Justinien, les greniers de l’empire et les rats des navires (Michael McCormick, « Bateaux de vie, bateaux de mort. Maladie, commerce, transports annonaires et le passage économique du bas-empire au Moyen Âge », dans Morfologie sociali e culturali in Europa fra tardo antichità e alto medioevo (Spolète, 1998)
  • Raconter l’histoire depuis le point de vue animal de rattus rattus ?
  • Le « petit âge glaciaire de l’Antiquité tardive » (530-680) : systèmes climatiques et écosystèmes sociaux (Jean-Pierre Devroey, La Nature et le Roi. Environnement, pouvoir et société à l’âge de Charlemagne, 2019)
  • En Scandinavie, du « grand hiver » (Fimbulvetr) au « crépuscule des dieux » (Ragnarök) : Winter is coming (Bo Gräslund et Neil Price, « Twilight of the gods? The “dust veil event” of AD 536 in critical perspective », Antiquity, 2012)
  • Pourquoi la peste du VIsiècle peut être dite justinienne : catastrophe épidémique et retournement de situation politique
  • Combiner les sources, malgré tout : Procope de Césarée et Jean d’Ephèse, « duo improbable », ont bien vu ce qu’ils ont vu (Kyle Harper, Comment l’Empire romain s’est effondré. Le climat, les maladies et la chute de Rome, 2019)
  • Le silo mortuaire des tours de Sykai et le pressoir mystique : « vendange dans la grande cuve de la colère de Dieu » (Jean d’Ephèse, Chronique de Zuqnîn)
  • Une épidémie qui avance par bonds : « Comme un champ de blé incendié, la ville fut soudainement enflammée par la pestilence » (Grégoire de Tours, Histoires des Francs, 9, 22)
  • Ne pas révoquer la valeur documentaire des sources au motif de leur discontinuité (Michael McCormick, « Gregory of Tours on Sixth-Century Plague and Other Epidemics », Speculum, 2021)
  • Les trois temps de la première pandémie : peste byzantine (542-600), accalmie du VIIsiècle (600-660), période ibérique (660-749) (Dimitri Stathakopoulos, Famine and Pestilence in the Late Roman and Early Byzantine Empire: A Systematic Survey of Subsistence Crisis and Epidemics, 2004)
  • « … la peste justinienne, après avoir peut-être contribué à expliquer Mahomet, a pu aussi expliquer Charlemagne » (Jacques Le Goff et Jean-Noël Biraben, « La Peste du Haut Moyen Âge», Annales, 1969)
  • Peste justinienne et peste noire : une comparaison historiographique inévitable
  • La peste et la chute des empires : lectures maximalistes, lectures déflationnistes (Lee Mordechai et Merle Eisenberg, « Rejecting Catastrophe: The Case of the Justinianic Plague », Past & Present, 2019)
  • Kyle Harper et la fin du monde, ou la chute de Rome sans les Romains de la décadence
  • Hantises collapsologiques et horizon eschatologique : la peste justinienne et le Moyen Âge aujourd’hui