Amphithéâtre Maurice Halbwachs, Site Marcelin Berthelot
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Résumé

Horapollon, que nous avons rencontré dans l’anthologie de Dioscore, est une figure célèbre de l’Alexandrie du Ve siècle, qui nous servira de guide pour entrer dans le monde de l’enseignement supérieur.

À la croisée des réseaux

Du fait de sa position qui lui fait jouer un rôle d’interface entre son arrière-pays (la chôra) et le bassin méditerranéen oriental, unifié sous la bannière de l’Empire romain d’Orient, Alexandrie draine de tout le territoire égyptien des élèves et enseignants attirés par la capitale : Horapollon lui-même est originaire d’un village près de Panopolis. On vient aussi de toutes les provinces de l’Empire pour se former ou achever sa formation à Alexandrie : c’est le cas des élèves qui suivent les cours de notre Horapollon d’après ce que nous en savons par la Vie de Sévère de Zacharie le scholastique.

 Alexandrie envoie aussi les siens dans les autres provinces où ils font carrière, disséminant dans le monde hellénophone un peu de cet esprit alexandrin qui fait sa réputation. C’est ainsi que le grand-père d’Horapollon quitte Alexandrie pour aller enseigner la grammaire et la littérature grecques à Constantinople, capitale de l’Empire.

Tous ces échanges révèlent l’extrême mobilité des acteurs de l’enseignement supérieur de l’époque : les étudiants n'hésitent pas, durant leur formation, à séjourner dans plusieurs centres universitaires en fonction de la discipline étudiée (Beyrouth pour le droit, Athènes pour la philosophie, etc.) et des diverses étapes du cursus suivi. Ainsi Alexandrie a attiré des étudiants souhaitant, entre autres, se former à la rhétorique avant de poursuivre leurs études de droit à Constantinople (Agathias de Myrina) ou à Beyrouth (Zacharie de Mytilène et Sévère d’Antioche) – une formation en rhétorique étant considérée comme une propédeutique aux études de droit ou une composante de celles-ci. On observe la même mobilité chez les enseignants. L’espace méditerranéen devient un lieu d’échanges universitaires et intellectuels selon le profil disciplinaire de ses grands centres et à la faveur des réseaux que les grandes familles aristocratiques tissent entre les cités de Grèce, d’Asie Mineure, du domaine syro-palestinien et d’Égypte sans compter Rome. Ces réseaux se construisent à la faveur de mariages mais aussi grâce à de vieilles familles dont l’histoire est marquée par des migrations et des disséminations à travers tout le monde méditerranéen.

Quelles (infra)structures ? (1)

Mais, dans un monde aussi concurrentiel, encore faut-il pouvoir offrir un environnement propice à des conditions d’études et d’enseignement qui soient jugées supérieures. La plainte d’Horapollon, trouvée dans la jarre de Dioscore, y fait allusion en parlant des « académies » (akadêmiai) qu’il fréquente et des « musées » (mouseia) auxquels son père a consacré tout son travail. Ces termes (qui font écho au Musée d’époque lagide et à l’école de Platon) nous font rentrer dans les infrastructures mêmes de l’enseignement universitaire alexandrin – qui, malgré ce que pourrait nous faire croire l’usage moderne du mot université, était un conglomérat disparate de cours dispensés par divers enseignants dont le statut n’était pas nécessairement identique.