Amphithéâtre Maurice Halbwachs, Site Marcelin Berthelot
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Résumé

Quelles (infra)structures ? (2)

Pour appréhender les statuts des enseignants dans leur variété, il nous faut nous intéresser à la part de l’État et des cités dans l’organisation de l’enseignement, notamment à partir de la législation impériale, et plus particulièrement de la constitution de Théodose II instaurant en 425 l’Auditorium du Capitole à Constantinople (CTh XIV, 9, 3). La situation que celle-ci évoque devait aussi valoir pour Alexandrie, avec des enseignants titulaires d’une chaire officielle côtoyant dans les bâtiments publics des enseignants privés qui n’hésitaient pas à y faire venir leurs étudiants. Mais force est de constater qu’il est difficile de déterminer le statut des professeurs que nous connaissons d’après les sources littéraires.

Nous sommes en tout cas mieux renseignés sur les infrastructures de cet enseignement supérieur grâce à la vingtaine de salles de cours (auditoria), datant de la fin du Ve ou de la première moitié du VIsiècle, découvertes à Kôm el-Dikka (au cœur d’Alexandrie).

Quelles étaient les matières dans lesquelles l’Alexandrie de l’Antiquité tardive a su se distinguer ? Malgré les réponses variées apportées par les auteurs anciens, trois disciplines reviennent plus fréquemment : la rhétorique (ainsi que la grammaire, qui lui est liée), la philosophie et la médecine (avec la figure typiquement alexandrine de l’iatrosophiste, litt. « médecin-sophiste », qui témoigne de la communauté de méthodes existant dans les trois grandes disciplines enseignées à Alexandrie). Les critiques que certains auteurs modernes ont émises sur l’importance de la première à Alexandrie sont l’occasion d’une mise au point réévaluant la notoriété de l’enseignement rhétorique alexandrin aux yeux des Anciens.

Quant à la discipline enseignée par Horapollon, les sources sont divergentes : il est présenté soit comme un grammatikos « grammairien » (Zacharie), soit comme un philosophos « philosophe » (l’anthologie de Dioscore, Étienne de Byzance, peut-être Damascius). L’examen de l’usage de ce dernier terme permet d’esquisser une solution : s’il n’est pas impossible qu’il ait enseigné les deux disciplines simultanément ou successivement, Horapollon serait bien un grammairien et le terme philosophe serait utilisé dans un sens large et non technique qui n’est pas rare à cette période.

Paganisme et christianisme

Avec la montée du christianisme au IVe  siècle, les cours de nos enseignants sont fréquentés par un public de plus en plus mélangé, où le contingent traditionnel des païens côtoie celui, sans cesse croissant, des chrétiens. La plupart du temps, on laissait au vestiaire ses opinions religieuses. Mais cela ne se passait pas toujours de façon aussi irénique. En témoignent les échauffourées entre étudiants chrétiens et païens durant les cours de notre Horapollon d’après le récit de Zacharie. Horapollon lui-même appartenait à une famille qui incarna la suprême résistance au christianisme.

Malgré ces épisodes d’affrontements, la promiscuité entre païens et chrétiens sur les bancs des auditoria fut plutôt pacifique et respectueuse de l’autre. Cette tolérance est peut-être une spécificité de l’enseignement que sut développer l’Alexandrie de l’Antiquité tardive.