Résumé
La deuxième conférence abordera la manière dont la politique agricole commune, inaugurée en Europe à la fin des années 1950, a d’emblée incarné un modèle productiviste, misant sur l’augmentation des rendements de manière à garantir la sécurité alimentaire du continent européen. Cette pression à l’intensification de la production agricole s’est faite au prix de plusieurs dérives, y compris un appauvrissement des sols, une dépendance de la production agricole à l’égard des énergies fossiles pour l’accès à des intrants (pesticides et engrais azotés), une disparition progressive des petites exploitations agricoles moins compétitives sur des marchés plus étendus, une alimentation reposant de plus en plus sur des produits transformés nocifs pour la santé et responsables d’une augmentation spectaculaire des maladies non transmissibles, et enfin des exportations vers les pays du Sud menaçant la viabilité des productions locales.
Les critiques à l’égard du modèle productiviste incarné par la politique agricole commune (PAC) ont gagné en audience dans les années 1990, amenant un progressif « verdissement » de la PAC, mais sans que cela débouche sur une remise en cause plus fondamentale. En effet, au moment où les scientifiques et les organisations de la société civile se font entendre sur ce sujet, les systèmes alimentaires dans l’Union européenne apparaissent déjà largement verrouillés : les composantes économiques, technologiques, culturelles et politiques ont coévolué au cours des années, expliquant la forte inertie de l’ensemble, ainsi que la dépendance de sentier affectant les réformes entreprises.
Cette conférence sera l’occasion de montrer la pertinence de la théorie des transitions pour analyser les échecs des réformes successives de la PAC.